L’absentéisme, le présentéisme et la désorganisation du travail sont des conséquences inévitables lorsque les entreprises ne prennent pas en compte les besoins de leurs salariés qui sont également des aidants. Ignorer cette réalité peut finalement entraîner des pertes financières considérables pour l’entreprise.
Le coût caché des salariés aidants : une étude révèle l’impact économique
Un enfant en chimiothérapie, un frère handicapé, une maman dépendante. Ils sont cinq millions de salariés qui doivent aider un proche. C’est ce que démontre Nathalie Chusseau, économiste et professeur à l’Université de Lille, dans une étude publiée vendredi 6 octobre. Décryptage avec Sarah Lemoine.
Sarah Lemoine : L’absentéisme, d’abord. Plus d’un quart des salariés aidants disent avoir été au moins une fois en arrêt-maladie, pendant l’année. Et 27% ont pris au moins un jour de congé sans solde. Or, dans la majorité des cas, le travail des absents n’est ni réalisé, ni compensé.
Le présentéisme, une réalité préoccupante
C’est lorsque le salarié travaille assidûment, alors que son état physique ou psychologique l’empêche d’être pleinement efficace. La cause principale, c’est la fatigue intense. C’est le cas des salariés aidants qui se disent épuisés, désemparés. À la clé, une perte de productivité liée aux retards, aux erreurs, au manque de motivation. Le présentéisme existe aussi en télétravail ou en temps partiel, quand la charge de travail reste la même.
Quelle est l’addition ?
Elle est très salée. Le coût caché des salariés aidants pour le secteur privé, au niveau macroéconomique, est compris entre 24 et 31 milliards d’euros, d’après les calculs de l’économiste Nathalie Chusseau. Rapporté à l’échelle d’une entreprise privée du secteur des services, qui emploie 100 salariés dont 20 aidants, c’est tout aussi conséquent : 171.000 euros par an.
Des solutions pour réduire l’impact économique
Ce que dit l’étude, c’est que ça coûte finalement plus cher à l’entreprise d’ignorer le problème, que de proposer des solutions. Aménager les horaires, baisser la quantité de travail, favoriser le télétravail, le temps partiel, la prise de congés, les dons de RTT. Mais aussi, informer en interne sur les droits et les aides, former les managers, ou prévenir l’épuisement avec des diagnostics santé.
« On est au milieu du gué, résume Jean-Manuel Kupiec de l’Ocirp. Les patrons et les DRH ont identifié le sujet, mais ils ne savent pas par quel bout le prendre. Ils craignent d’ouvrir la boîte de Pandore, et d’avoir à gérer une multitude de situations individuelles ».
Certaines entreprises ont déjà passé le pas. Chez Airbus, par exemple, les salariés bénéficient désormais de 12 jours par an, pour aider leurs proches.
Ce constat alarmant met en lumière la nécessité pour les entreprises d’adapter leurs politiques vis-à-vis des salariés aidants. La prise en compte de leur situation particulière peut non seulement améliorer leur bien-être et leur productivité, mais aussi réduire les impacts économiques négatifs pour l’entreprise. Les solutions proposées par l’étude, telles que l’aménagement des horaires et la sensibilisation des managers, sont des pistes à explorer pour répondre efficacement à ce défi. Il est temps pour les employeurs de mettre en place des mesures concrètes qui soutiennent les salariés aidants et favorisent un équilibre entre vie professionnelle et personnelle.